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Il n’est jamais trop tôt pour préparer sa succession

« Qui va hériter et de quel montant ? » Au-delà des principales questions que chacun se pose en matière de transmission patrimoniale, les facteurs à prendre en considération et les pièges à éviter sont nombreux, principalement dans un contexte international. Évocation de ces enjeux avec Claude Medernach, Legal Counsel Grands Clients Familiaux au sein de la Banque de Luxembourg.

Lorsqu’on parle de transmission du patrimoine, quels grands enjeux faut-il considérer ?

En ce qui concerne les enjeux de succession, nous sommes confrontés à deux principales questions. Qui va hériter ? Et combien chacun va-t-il toucher ? Pour y répondre, il faut donc considérer les grands principes inscrits dans le code civil luxembourgeois, qui fixe notamment l’ordre de succession. Les héritiers au Luxembourg sont en principe les enfants et le conjoint survivant, à défaut les parents s’ils sont encore en vie, sinon les frères et sœurs ou les neveux et nièces. D’un point de vue fiscal, il n’y a en principe pas de droits de succession à payer au Luxembourg pour les héritiers en ligne directe, soit le conjoint survivant ou les enfants. Dans le cas où il n'y a ni conjoint survivant ni enfant, et que la succession revient par exemple à un frère, une sœur, des neveux, ou même une tierce partie, des droits de succession s’appliquent et peuvent au pire des cas monter jusqu’à 48% du patrimoine transmis.

Il est important de noter qu’il est possible de s’éloigner - dans certaines limites - des règles fixées par le code civil notamment à travers la rédaction d’un testament, qui peut être un simple écrit rédigé à la main par le testateur (testament olographe), comme un document enregistré formellement auprès d’un notaire (testament authentique).

Dans quelle mesure peut-on s’éloigner des règles fixées par le code civil ?

Dans le cadre d’une succession, la loi luxembourgeoise prévoit une réserve légale et une quotité disponible. La réserve légale est la valeur du patrimoine revenant obligatoirement aux héritiers selon l’ordre déterminé par le code civil. La quotité disponible est la part du patrimoine qui peut être transmise selon les volontés du testataire . S’il y a un enfant, la réserve légale correspond à la moitié de la valeur du patrimoine. S’il y a deux enfants, cette réserve s’élève à deux tiers des avoirs du testateur. Autrement dit, celui-ci peut déterminer à qui revient le tiers restant, en rappelant que des droits de succession peuvent s’appliquer sur cette part de l’héritage. S’il y a trois enfants ou plus, la réserve légale correspond à trois-quarts du patrimoine.

La situation familiale et patrimoniale des résidents luxembourgeois revêt souvent une dimension internationale. Quel impact cette dernière peut-elle avoir sur les enjeux de transmission ?

Il ne faut pas la négliger. Dans de nombreux cas, les héritiers vivent en dehors du Luxembourg. Il est fréquent aussi qu’une part du patrimoine, comme une résidence secondaire par exemple, se situe à l’étranger. Si votre enfant vit à Paris, par exemple, il faut savoir qu’il devra payer les droits de succession sur sa part de l’héritage, comme le prévoit la fiscalité française. C’est la même chose pour un héritier résidant en Allemagne.

Pour un bien situé à l’étranger, c’est la loi en vigueur là où il est situé qui s’applique. Il y aura donc des droits de succession à payer sur la valeur du bien selon le pays, la région ou le canton (si l’on parle de la Suisse) où il se trouve. Ne pas anticiper ces aspects peut amener à des déconvenues.

Quels conseils donneriez-vous à celles et ceux qui souhaitent préparer leur succession et éviter les mauvaises surprises ?

D’anticiper ces enjeux. Il n’est jamais trop tôt pour le faire. Dans le cadre de la préparation de la succession, nous recommandons aussi d’impliquer l’ensemble des parties concernées, pour éviter des litiges familiaux. Ceux-ci surviennent le plus souvent lorsque les héritiers découvrent par exemple des situations déséquilibrées après le décès du testateur. Il est toujours préférable d’en discuter ensemble, de fixer ces éléments de son vivant, particulièrement si la situation revêt une certaine complexité, dans le cas où une entreprise familiale se trouve au cœur de la succession, par exemple.

Quels pièges une bonne anticipation permet-elle d’éviter notamment en présence d’une entreprise familiale ?

Si la succession inclut une entreprise familiale, la valeur de celle-ci est constitutive du patrimoine global et intègre donc la réserve légale. Il faut aussi en avoir conscience. Il n’est pas possible, par exemple, de céder l’entreprise aux seuls héritiers qui ont décidé de s’y investir à moins que le patrimoine privé à côté de l’entreprise familiale ne soit si important qu’il permette de combler la réserve légale des enfants ne travaillant pas dans l’entreprise. La transmission concerne l’ensemble des héritiers. Il est important d’anticiper ces éléments, notamment aussi à travers la mise en place d’une gouvernance familiale ou d’un pacte d’actionnaires, qui régit les droits et devoirs de chacun (qu’ils soient par la suite actionnaires actifs ou passifs dans l’entreprise) et établit un ensemble de règles assurant la préservation de l’entreprise.